Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

philoenclassestechno

philoenclassestechno

Cours de philosophie pour les élèves des classes de terminale technologique


Faut-il être cultivé pour apprécier une oeuvre d'art ?

Publié par NL sur 16 Janvier 2016, 18:30pm

Catégories : #art, #culture

Faut-il être cultivé pour apprécier une oeuvre d'art ?

Ce sujet de dissertation a été donné au baccalauréat technologique en France métropolitaine en 2012.

Culture :

  • avec culturel, s’oppose à ce qui est naturel ; question : peut-on naturellement apprécier les œuvres d’art ?
  • Avoir de la culture, par la mise en valeur des facultés humaines, intellectuelles, artistiques, spirituelles, linguistiques… Sans doute le fait d’apprécier, de « goûter » des œuvres d’art dépend-il d’un certain état du développement des facultés humaines ; davantage, même : sans un certain développement de ces facultés, sans un certain degré de « culture », on n’apprécierait pas « à leur juste valeur » certaines œuvres. Caractère « élitiste » sans doute du jugement de goût.
  • Des cultures, c'est-à-dire des manières dont les différents peuples dans leur diversité géographique ou historique se caractérisent par des phénomènes culturels qui les différencient les uns des autres. Dans ce cas, c’est la question du relativisme en matière de goût qui se pose, et la question de savoir si précisément le jugement de goût peut ne pas être entravé dans sa libre expression par les contenus culturels, des systèmes de représentations et de valeurs exprimées dans des façons diverses et propres de se rapporter au monde, aux autres cultures et à l’humanité dans son ensemble.

"Apprécier" :

  • Trouver à son goût, Trouver beau, Plaisir esthétique (=/plaisir intéressé des sens)
  • Juger (apprécier à sa juste valeur)

"Œuvre d’art" :

  • =/ chose (objet d’usage), et au produit de l’action (événements, actes et mots). Aucune utilité vitale ;
  • Artiste =/ artisan ; question des règles de l’art – préexistent-elles à l’œuvre ?

Problématique : Ou bien le plaisir esthétique s’éduque, et dans ce cas, il faut être cultivé pour apprécier les œuvres d’art, ou bien le plaisir esthétique est immédiat et sensible, et dans ce cas, il n’est pas nécessaire d’être cultivé pour goûter un plaisir devant une œuvre d’art.

  1. Il n’est nul besoin d’être particulièrement cultivé pour apprécier la beauté d’une œuvre, qui peut plaire universellement.
  1. Si le beau est ce que l’on attend d’une œuvre d’art, le beau étant ce qui plaît à tous, il n’est nul besoin d’être cultivé pour jouir d’une œuvre d’art
    1. Le plaisir esthétique se distingue du plaisir des sens lié a l'agréable

Distinction Beau/joli, quotidienne.

Cette distinction invite à insister sur la différence que l’on peut mettre entre les œuvres d’art, d’une part, et les caractères agréables que l’on prête, ici ou là, à tel ou tel objet parce qu’il plait à nos sens. Y a-t-il en effet quelque chose de commun entre le plaisir que l’on ressent à déguster un bon gâteau, que l’on prend à admirer un corps qui nous plait, et à la contemplation d’une œuvre (qui représente éventuellement un corps sans attrait ou charme…) ? Si les premiers sens n’ont rapport qu’à nos seuls goûts, et que ceux-ci sont essentiellement relatifs (les goûts des uns ne sont pas forcément les goûts des autres), ne faut-il pas distinguer ces goûts des sens (subjectifs et relatifs), du jugement porté sur le beau, qui nous plaît sans forcément flatter nos sens ?

C’est ce que soutient Kant au §7 de la Critique de la faculté de juger. Pour lui, si l’agréable, ce qui plaît au sens, est du domaine non seulement du subjectif, mais essentiellement relatif aux goûts de celui qui éprouve ce plaisir, il ne saurait en aller de même du plaisir esthétique pris au beau. Le beau « plaît universellement sans concept », ou du moins, puisque c’est une exigence, doit plaire. L’universalité du beau est ainsi non pas acquise, mais exigée dans le jugement de goût portant sur le beau.

Comment comprendre que puisse exister une telle exigence s’agissant du beau, alors qu’elle serait risible à propos de l’agréable (où règne la règle : "A chacun ses goûts") ?

  1. Le plaisir esthétique, plaisir universel désintéressé, sans concept (Kant)

C’est que le plaisir esthétique que l’on éprouve à la beauté d’une œuvre est un plaisir désintéressé. De plus, alors que certaines formes de beauté mesurent la conformité dans le jugement de leur objet à l’idée que nous nous faisons de celui-ci (une belle maison – bien faite ; un beau cheval – bâti pour la course…), le jugement portant sur la beauté d’une œuvre est davantage un jugement libre de toute idée préconçue de ce à quoi devrait être mesuré l’objet.

Ceci correspond à la distinction que fait Kant (même référence, §16-17) entre deux types de beautés : d’une part, la beauté qu’il appelle « adhérente », d’autre part, celle qu’il nomme « libre ». La beauté « adhérente » requiert la perfection de l’objet (jugé beau) d’après le concept (l’idée) que l’on en a ; la beauté dite « libre » ne requiert pas un tel concept. Or, pour Kant, seule la beauté « libre » convient à un jugement de goût dit « pur », c'est-à-dire non soumis à la finalité d’un concept auquel le jugement viendrait mesurer la chose (perfection de la maison en fonction de l'idée d’une maison, qui suppose qu'elle remplisse certaines fonctions et soit dotée en conséquence de certaines qualités…). Dès lors, la beauté d’une œuvre n’a pas à se mesurer à des critères extérieurs à celle-ci (comme l’harmonie, la perspective, la symétrie…). Or, un tel jugement « pur » doit être reconnu indépendant de toute connaissance particulière, et n’exige donc aucune culture particulière. Il témoigne plutôt d'une liberté dans l'attrait que l'homme peut rencontrer indépendamment du caractère utilitaire ou technique que les objets ne manquent pas d'avoir, le plus souvent, pour lui.

Trans. : La distinction entre le beau et l’agréable, ainsi qu’entre deux types de beauté permet ainsi de confirmer que tout homme a accès, quelle que soit sa culture, et l’état de ses connaissances et de son jugement intellectuel, à un jugement de goût "pur" (ou désintéressé) des sens. De plus, s’il n’est pas nécessaire d’être cultivé pour apprécier ou goûter d’une œuvre d’art, c’est que ce que l’on retrouve dans l’œuvre, ce sont des traits humains universels.

  1. Ce que l’on retrouve dans l’œuvre de l’artiste, ce sont des traits humains universels
    1. ce sont des manières de satisfaire des désirs inconscients que nous pouvons partager avec l’artiste, sans que nous ayons à connaitre davantage l’histoire des arts (Freud)

Ce que n’importe qui peut partager, dans le plaisir esthétique, avec l’artiste, dans l’œuvre, ce sont des désirs et des émotions qu’il ne peut s’avouer, mais qu’il retrouve, grâce à l’artiste, dans une œuvre. Ainsi, pour l’artiste, l’œuvre est une manière de tirer une satisfaction de ses désirs inconscients, tout en établissant un lien avec la réalité (reconnaissance sociale), et pour le spectateur, l’œuvre est une occasion offerte de découvrir qu’il partage avec l’artiste certains désirs, certaines associations inconscientes, et une manière de reconnaître certains aspects auparavant inavouables de sa personnalité.

C’est ce que soutient Freud dans son autobiographie intellectuelle, Sigmund Freud présenté par lui-même (1925), en rappelant ses conceptions de l’activité artistique comme une activité de sublimation : en faisant œuvre, l’artiste retrouve le chemin de la réalité et sort de son monde fantasmatique, en obtenant une contrepartie (reconnaissance) pour ce compromis avec la réalité (principe de plaisir/principe de réalité) ; le spectateur, quant à lui, peut jouir dans l’œuvre d’un aspect de sa personnalité qu’il n’osait guère s’avouer. Il n’est nullement besoin d’être particulièrement cultivé pour retrouver dans l’œuvre d’art ces motifs inconscients, dont les surréalistes ont su tant jouer (Dali, Belmer par ex.). C’est ainsi que ce qui émeut le plus profondément dans une œuvre, c’est un voile mystérieux, des désirs inconscients à l’œuvre chez l’artiste (ainsi dans l’interprétation freudienne, 1914, le Moïse de Michelange : le Moïse représenté par le sculpteur à l’instant où il y a lutte chez Moïse entre sa passion – colère – et sa mission – éthique).

Trans. : Toutefois, il semble que devant certaines œuvres contemporaines, le regard du profane ne sache plus quoi ni où regarder… n’y aurait-il pas de ce point de vue un art classique, et pourquoi alors aller chercher du côté de cet art classique des référents de beauté ?

  1. c’est l’enfance de l’homme (Marx)

Comment est-il possible que nous apprécions encore des œuvres d’art vieilles de plus de deux mille ans ? N’est-ce pas que le plaisir esthétique n’est pas essentiellement soumis à la mode ? Peut-être est-il plus approprié de parler d’un plaisir en quelque sorte « naturel » pris à la contemplation d’œuvres d’art antiques. Dans ce cas, si la beauté de ces œuvres nous parait naturelle (Praxitèle, Phidias – à propos de ce dernier, la légende de la statue d’Athéna qui devait être portée sur un réceptacle à 4 mètres de haut ; en découvrant son œuvre, ce fût un tollé, tant les membres paraissaient déformés ; Phidias demande alors qu’on porte la statue sur son piédestal, où elle prend alors de parfaites proportions), n’est-ce pas que ces œuvres font appel à la présence d’un universel en l’homme ?

C’est la thèse de Marx dans Contribution à la critique de l’économie politique, où il défend le fait que si les Grecs antiques sont encore pour nous un sommet du beau dans les arts, c’est qu’ils représentent pour nous une enfance idéale, qu’ils étaient des « enfants normaux », et que nous sommes en quelque sorte touchés par le charme « éternel » de ces réalisations appropriées parfaitement à la nature de l’homme. Voilà sans doute, pour Marx, pourquoi encore en son temps, le culte de l’Antiquité grecque classique dans les arts est de mise.

transition : On peut se demander si cette dernière appréciation n’est pas purement et simplement ethnocentriste : en quoi la culture grecque, l’une des origines de la culture européenne, serait-elle qualifiée de « normale » (au contraire, par exemple, de l’art hindou de Sigiriya au Sri Lanka- V è s.) ? Pour autant, « apprécier » n’a pas simplement le sens de plaire (l’œuvre visant à produire le sentiment du beau), mais encore de « juger ». Or, pour juger, il fait détenir des critères de jugement. Ainsi, le critique d’art a nécessairement besoin d’une certaine culture artistique.

II. L’œuvre d’art exige d’être appréciée indépendamment d’un regard naïf ; pour juger d’une œuvre, il faut connaitre les œuvres d’art

Si l’on prend la culture au sens d’idéal de mise en valeur des facultés humaines, il est des personnes plus ou moins cultivées. Or, il n’est pas impossible que pour apprécier une œuvre, non plus simplement au sens de la trouver belle, mais au sens d’être capable de la juger convenablement, il soit nécessaire d’accéder à un certains nombre de connaissances, voire de postures, qui ne sont en rien naturelles.

Dans ce cadre, il faut souligner la différence de l’œuvre d’avec un simple objet de distraction. De plus, l’œuvre d’art que nous trouvons belle ne signifie pas que son sujet l’est nécessairement (il y a donc un langage du beau qui n’est en rien naturel) ; enfin, le simple fait de savoir distinguer ce qui relève ou non de l’art peut être malaisé pour le profane, notamment dans l’art contemporain.

  1. Contempler une œuvre n’est pas un simple loisir ; goûter à une œuvre exige donc une certaine disposition, et celle-ci un certain degré de culture

Si le loisir est à la portée d’un chacun, et qu’il n’est pas nécessaire d’être cultivé pour tirer profit de ses loisirs (repos, distraction, amusement, …), il est loin d’être évident que le rapport avec l’œuvre d’art prenne la forme du simple loisir. Qu’y a-t-il de commun entre la contemplation d’une œuvre d’art et une partie de football, ou une partie de cartes ? Est d’abord en cause le caractère sérieux de l’activité de l’amateur d’art, contre le caractère « sans gravité » du loisir.

Mais plus fondamentalement, il y a dans l’œuvre une signification qui est irréductible au seul plaisir que nous en tirons. Il y a un souci dans le regard posé sur une œuvre qui rend nécessaire le jugement sur celle-ci. Avec ce jugement, nous échappons au caractère relatif de ce qui est plaisant, de ce qui nous « distrait », de ce qui nous permet de nous délasser (toutes fonctions utilitaires), pour traiter à travers l’œuvre de ce qui est digne de durer par delà l’homme. En ce sens, parce que l’œuvre d’art est davantage qu’un simple objet de consommation, on ne peut la réduire à un loisir, et elle exige pour être appréciée un certain degré de culture, mais aussi une certaine disposition à son égard. A l’époque de la reproduction en série, ce qui menace, ce n’est pas la diffusion des œuvres (par exemple, des textes), mais la réduction de celle-ci à la simple forme du délassement (ainsi dans les dessins animés de Disney, à partir des contes). L’œuvre permet moins de remplir notre temps libre, que de donner un sens à une réduction de notre temps de travail (elle indique une forme d’existence qui donnerait une valeur au temps libre, à rebours du prix de la consommation des loisirs dans le temps vide).

C’est là le sens de la distinction qui apparaît chez Hannah Arendt (Crise de la culture) de l’objet et de l’œuvre, de l’œuvre qui fait culture, qui a pour caractère sa durabilité, voire sa permanence, des objets (techniques, d’usage), qui sont consommés dans le cycle biologique humain. La possibilité de produire en série des objets de consommation (meubles, maisons…) accentue cette absence de durabilité des objets d’usage, dont l’usure s’atteste par leur obsolescence programmée (Günther Anders). Au contraire d’être un simple phénomène de la vie, l’œuvre est un phénomène du monde, elle fait exister le monde pour les hommes, en échappant à sa pure consommation, à la logique consumériste contaminant la sphère du temps libre (loisir, otium =/negocium – affaires), en produisant du temps vide. En cela, les œuvres échappent au cycle purement biologique du vivant, pour durer et produire pour l’homme « le monde ».

Pasolini : « la culture est ce qui résiste à la distraction » (entre dans la distraction le fait de reconstituer sa force de travail – Marx, ou celui de consommer du loisir – sans sortir par là d’une logique comptable du temps, utilitaire).

Si l’œuvre n’est donc pas un simple objet de loisir, le caractère de la beauté que nous y trouvons est irréductible au contenu ou à l’objet qu’elle représente (si elle en représente un).

  1. Le propos de l’artiste ne consiste pas à reproduire le beau (naturel), mais à le produire (créer) : c’est le tableau qui est beau comme tableau, non pas ce qu’il représente (son contenu de représentation)

Il ne faut pas confondre le plaisir pris à la contemplation d’une œuvre d’art avec le caractère agréable de l’objet qu’elle représente (quand elle en représente un). En effet, il y aurait autrement une certaine déception dans le regard du néophyte qui contemplerait, par ex., un tableau représentant des raisins, à vouloir y retrouver la beauté de l’objet peint (et à mesurer la beauté de l’œuvre au traitement réaliste du sujet) ; plus généralement, la beauté d’un tableau ne se mesure pas à la beauté naturelle de l’objet (ou du sujet) que le peintre représente, mais plutôt au traitement du sujet par le peintre. Les références auxquelles mesurer la beauté du tableau ne sont donc pas données à chacun, mais exigées de lui pour comprendre la beauté de l’œuvre : ces références sont non pas externes aux œuvres (on pourrait les trouver dans la vie), mais internes aux œuvres (histoire de l’art).

C’est en cela qu’il y a une différence de nature entre la vision de l’artiste et la vision du non-artiste : pour le premier, ce qui plaît, c’est le tableau ; pour le second, c’est le sujet représenté par le peintre. C’est ce que soutient André Malraux dans Les voix du silence (1951), où il cherche à comprendre l’incompréhension du profane pour l’art moderne : « un coucher de soleil admirable, en peinture, n’est pas un beau coucher de soleil, mais le coucher de soleil d’un grand peintre » (au passage, Malraux rappelle que le peintre n’imite pas le réel, mais le métamorphose). L’œuvre exige ainsi pour être pleinement comprise et jugée un réseau de références qui ne sont pas naturelles, qui n’ont pas tant égard à la vie quotidienne qu’au monde de l’art (à l’histoire de la peinture, de la musique…). La référence de l’œuvre, ce sont les œuvres, et non pas la vie. Aussi, le langage artistique ne trouve-t-il sa référence qu’en lui-même, et nécessite ainsi une éducation à ce langage, qui n’est d’abord pas connu du profane (celui qui n’est pas initié à ce langage).

Ex : les Ménines de Picasso, d’après Vélasquez

C’est donc que pour apprécier une œuvre, au sens de pouvoir se prononcer sur la beauté d’une œuvre en toute connaissance de cause, étant données les références dont chaque œuvre est porteuse, il est nécessaire d’être cultivé, c'est-à-dire de maîtriser ces références. Mais on peut aller plus loin, dans la même direction, et s’interroger non plus sur la seule qualification d’une œuvre comme belle, mais la simple distinction d’une œuvre (dont le sens nous échappe), avec ce qui n’en est pas (une œuvre). Cette distinction devient en effet de moins en moins aisée, si elle l’a jamais été, avec l’art moderne, du fait notamment du jeu de celui-ci avec les codes de l’art.

C. Il est nécessaire pour comprendre les œuvres, notamment les plus contemporaines, de savoir ce qui est de l’art/ce qui n’en est pas

La question de l’œuvre de qualité (« belle ») et celle de l’œuvre tout court (de plus ou moins bonne qualité, plus ou moins « belle ») se pose à plus juste titre à partir de l’importation dans les collections d’art d’œuvres qui semblent se donner d’abord pour de simples objets, voire produits de consommation. Ainsi par exemple, des fameux ready-made de Duchamp (roue de bicyclette, urinoir, porte-bouteilles) ou les facs-similés (imitation) de boites de Brillo (savon) de Warhol). La question ici est : le fait d’être cultivé et de prendre pour de l’art ce qui aux yeux du profane est une supercherie ne rend-il pas caduque la prétendue supériorité de la culture sur le sens commun ? Ou encore : à ce compte, n’importe quoi ne peut-il pas être une œuvre d’art ? (ce qui semble discréditer dans tous les cas la distinction entre œuvre d’art et objets d’usage).

Pour Arthur Danto, ce qui distingue ces « œuvres » des objets ou produits de consommation qu’elles sont par ailleurs (chez Duchamp) ou qu’elles représentent (chez Warhol, Pop Art), c’est une théorie de l’art qui permet d’en comprendre le sens. Ce qui surprend, ce n’est pas qu’elles soient ou ne soient pas du grand art, mais qu’elles soient de l’art tout court. Mais c’est aussi, à travers ces théories, à un questionnement sur la fonction de l’art, voire de l’artiste (imiter la réalité ?), qui est en jeu.

Pour Nelson Goodman, Manières de faire des mondes (1992) le destin différencié de l’objet de consommation et de l’œuvre de l’artiste est compris comme symbolisation ou exemplification : c’est en effet à un changement de fonctionnement de l’objet auquel on assiste, dans le passage d’un objet quotidien du statut d’objet quotidien (utile ou inutile, urinoir ou caillou sur la route) à celui d’œuvre (la fonction symbolique de l’objet passe alors au premier plan, et l’artiste demande alors que l’on regarde ce qui n’est habituellement pas regardé, mais simplement utilisé, voire vu, ou ignoré purement et simplement).

conclusion : Si l'appréciation d'une oeuvre d'art semble pouvoir se passer de toutes connaissances et de toute culture, en réalité, il n'en va pas précisément ainsi. Pour autant, ce n'est pas que les oeuvres soient réservées à une élite, mais bien plutôt que par elles, la culture pose certaines exigences au spectateur, à l'auditeur, et cherche véritablement, où qu'elle le trouve, à l'élever, c'est à dire à faire en sorte que sa surprise, l'attrait ou la répulsion, ne reste pas dédain ou indifférence, mais se découvre comme sujet culturel dont la référence passe sa mesure. L'art est ainsi source d'étonnement et moyen d'accès privilégié à la culture.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article

Archives

Nous sommes sociaux !

Articles récents