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Cours de philosophie pour les élèves des classes de terminale technologique


Correction DST N° 2 CONSTANT

Publié par NL sur 22 Novembre 2015, 18:04pm

« L’homme doit-il toujours dire la vérité ? »

Introduction : L’homme doit-il toujours dire la vérité ?Il existe, certes, un devoir de dire la vérité : chacun peut attendre de l’autre qu’il lui dise la vérité, parce qu’il doit lui-même la lui dire. On peut se demander ce que serait une société où chacun aurait pour idée première que l’autre lui ment : à ce compte, la méfiance serait universelle, et les rapports humains impossibles. Pour autant, si ce devoir de dire la vérité, et l’attente de la véracité ou de la sincérité de l’autre, semble aller de soi, ce devoir est-il absolu ? A-t-on dans tous les cas et en toutes circonstances ce devoir de dire la vérité ? La difficulté pourrait consister dans le fait que ce devoir, si on cherchait à le remettre en cause dans son caractère absolu (on ne peut jamais mentir légitimement, on n’a pas le droit de mentir), risquerait de représenter une aubaine et une justification pour les menteurs. Et pourtant ne peut-on pas être poussé à mentir, non par paresse, lâcheté, facilité, mais au contraire… par devoir ? Si la vérité est la conformité d’un discours à la réalité, dire la vérité, c’est donc dire les choses conformément à la réalité, et le devoir de dire la vérité, le devoir de dire les choses telles qu’elles sont, sans mentir. On peut se demander non seulement si le devoir de dire la vérité est absolu (on n’est jamais autorisé moralement à mentir), mais aussi s’il n’y a pas plusieurs manières de mentir et de dire la vérité. L’enjeu du sujet est donc d’ordre pratique : ne faut-il pas justifier dans certains cas le mensonge ou l’omission de la vérité, ou même ne faut-il pas réfléchir aux meilleures manières de dire la vérité, si c’est toujours un devoir, à quelqu’un (car certaines situations exigent quelques précautions) ? Autrement dit, si nous reconnaissons bien le devoir moral, ne faut-il pas encore s’intéresser aux conséquences probables ou certaines de nos paroles ? L’homme a-t-il le devoir de dire toujours la vérité, quelles qu’en soient les conséquences, ou bien l’homme peut-il parfois cacher la vérité en raison des conséquences de celle-ci ?

Argumentation : L’homme ne doit pas dire la vérité dans certains cas, en raison des conséquences que ces paroles pourraient avoir

[argument général] On ne saurait être aveugle aux conséquences de nos actions, quand bien même nous respecterions la morale. Ainsi, si nous obéissons aux principes moraux, c’est dans l’esprit du respect de la morale que nous le faisons. Or, il se pourrait qu’en obéissant formellement à la morale (en faisant notre devoir), nous désobéissions en fait à l’esprit de la morale (du devoir). Ainsi, si en obéissant au principe moral selon lequel il faut dire la vérité, nous pensons avoir égard à autrui, il se peut, dans certains cas, que nous ne fassions rien d’autre que lui nuire, en étant en fait immoraux. Dès lors, il faudrait, dans l’obéissance au devoir de dire la vérité, avoir égard (faire attention) non seulement à notre obligation formelle (« je dois toujours dire la vérité, quoiqu’il arrive »), mais encore aux conséquences probables ou certaines de notre obéissance (il se trouve qu’en disant la vérité, en faisant mon devoir apparemment, je contribue en fait à faire commettre une action contraire à la morale). Ce serait donc ici le problème d’une contradiction entre devoirs : ne faudrait-il pas alors revoir l’ordre des priorités ?

[illustration] C’est ce que soutient Benjamin Constant dans Des réactions politiques, en critiquant la thèse de Kant (le devoir de dire la vérité est absolu) et les conséquences que Kant en tire (il faut toujours dire la vérité, et le mensonge est toujours en crime, même si celui qui ment pense le faire avec une intention morale). A des assassins qui nous demanderaient si notre ami s’est réfugié dans notre maison, Kant nous propose donc, au nom du devoir, de leur dire la vérité (sans quoi, en mentant, nous commettrions un crime). Constant, suivant en cela le sentiment commun, propose de s’entendre sur ce qu’est un devoir. Certes, il faut dire la vérité, c’est là un devoir ; mais il ne faut pas dire toujours, à tous, la vérité, si ce devoir nous conduit, dans ses conséquences, à ce qui nous semble une absurdité. En même temps, on ne peut faire qu’une exception très limitée au principe moral (selon lequel dire la vérité est un devoir), sans quoi les hommes ne pourraient plus s’accorder leur confiance. Il argumente ainsi : les devoirs ne valent qu’en contrepartie de droits. Il n’y a de devoirs qu’à l’égard de ceux qui ont des droits ; or, certains ne devraient pas avoir droit à la vérité (parce que l’usage qui en serait fait serait contraire à l’esprit du principe moral) ; dès lors, envers ces hommes, il n’y aurait pas de devoir de dire la vérité. Ainsi, je pourrai légitimement mentir à ces assassins. Il y a donc pour lui un devoir de dire la vérité, et une exception à ce devoir : sauf quand certains veulent en faire un usage qui nuirait (aux droits) d’autrui[i].

[i] Kant justifie sa thèse en imaginant, après la critique de Constant, que celui qui aurait menti aurait peut-être conduit (malgré lui certes) les assassins à son ami, qui durant le mensonge à la porte serait sorti par la fenêtre, parce que les assassins n’auraient pas été conduit à visiter le domicile, mais auraient immédiatement fait le tour de la maison.

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